vendredi 18 juin 2010

"La barre au centre, gouvernez comme ça"

On a un problème majeur, là.
Pas du genre qui fera des morts. Parce que bon, de toutes façons, mort, c'est écrit dans les notes de bas de page du contrat. Alors on ne va pas y revenir. Ça, c'est fait.

Majeur, c'est amusant, parce que les mineurs c'est important aussi. Les mineurs d'aujourd'hui sont les majeurs de demain. Ceux qui paieront les retraites. Pendant 50 ans de cotisation.

Problème majeur donc.

Parce que, vous voyez, la durée de vie d'une espèce (la nôtre en l'occurrence), c'est pas énorme.
La vie, au sens de cette activité biologique commune terrestre, est apparue il y a 3,8 milliards d'année.
Il y a 55 millions d'année, les premiers primates viennent voir ce qu'il y a de nouveau dans les bacs.

Ils ont fait quoi les mecs pendant 3,745 milliards d'année ? A part se prendre des pluies de météorites, des explosions volcaniques, des ères glaciaires sur le coin de l'arcade sourcilière, qu'ils avaient fort prononcée, soit dit en passant ?

Et après, il a encore fallu 48 millions d'année pour que le premier hominidé trouve que, oui, la vie sur terre valait la peine d'être vécu. Et pourtant, ils n'avaient pas d'iPad à l'époque.

Ensuite, chaque espéce d'homo a vécu 1 à 2 millions d'année.
Homo sapiens, Cro magnon en fait, est apparu il n'y a que 35 000 ans. Il lui reste donc presque tout son millionnénaire (par néoanalogie avec millénaire), soit 40 000 générations.


Et nous avons fait quoi en 1 400 générations ?
1 400... vous imaginez que, en fait, si Cro Magnon avait commencé à tenir des registres d'état civil, vous pourriez retrouvez votre arrière-arrière-...1 400 fois...-grand-mère ?

Et bien, ta mamie là, pour résoudre des problèmes dans la durée, elle a inventé la culture.
La culture, c'est la meilleure façon de transmettre des moyens de résoudre des problèmes si longtemps qu'à la fin on en oublie l'origine de tout ça.

Mais, depuis les Lumières, grosso modo 13 générations, la culture évolue et diverge en perdant de vue les problèmes dont elle nous protégeait. Je dis "la" culture en général. Mais c'est bien de chaque culture individuellement dont je veux parler.

Et c'est bien ou c'est pas bien ?

Je ne sais pas. Je m'en moque un peu, même si ces chambardements ont leur part de responsabilité dans les maux du moment.


Mais là, on commence à avoir de bons gros vrais problèmes : démantèlement de la société, menaces environnementales, dérives financiarisantes.

La culture comme solution. Oui, oui, oui, si, si, vous verrez.
Enfin non : nous ne serons plus là.


En attendant, on appellera ça des règles. Des lois, des traités par-ci, par-là.
Voire une forme de morale finalement. Au sens d'un système de principes partagés et reconnus comme justes.

Parfois, je me demande si je ne suis pas du genre post-chrétien de gauche.


Mais alors, surtout, la politique, c'est accessoire. Le plus important, c'est la société, ses mouvements, ses choix. Et la politique devrait se faire plus humble face à ça.

L'élection du président de la République au suffrage universel direct est sans doute un grand désastre dans ce domaine.

Il n'y a que la société dans son ensemble qui puisse prendre de vraies décisions. Le peuple, souverain. C'est écrit tout en haut, dans la Constitution.

Les partis politiques ne sont que les reflets de quelques vagues de la société.
Et en ce moment, au centre, c'est plutôt la risée, dans les deux sens du terme d'ailleurs.


Alors, je n'ai pas trop envie d'attendre 13 générations de plus pour qu'un sursaut se produise, vous comprenez ?


Parce que 40 000 générations de petits-enfants nous regardent déjà gesticuler et faire des ronds dans l'eau, entre deux grosses vagues.


Cherche capitaine désespérément.


PS : le titre, c'est un ordre de barre, dans la Marine, quand on ne sait plus trop où on en est et qu'il nous faut un peu de temps pour faire le point, tu vois ?

lundi 10 mai 2010

Des marchés financiers, de l'Europe, de ton avenir.

Les bourses mondiales connaissent de très importantes variations. Les doutes liés à l'activation du plan d'aide de l'Union Européenne à la Grèce et les révision à la baisse des notes des dettes souveraines de la Grèce, de l'Espagne et du Portugal ne doivent pas y être étrangers.
L'Euro est également emporté et continue de se déprécier.
Et au passage, le Dow Jones a connu sa plus forte variation au cours d'une journée depuis sa création (-9,06%).

Les marchés ont donc jugé probable la faillite de la Grèce à terme, risquant d'entraîner celle de l'Espagne et du Portugal.

Dans le même sillage, le gouvernement français annonce son train de mesures d'austérité : gel des dépenses de l'Etat, des territoires, des dépenses sociales, rabotage des niches fiscales. L'objectif est de ramener le déficit public à 6% du PIB dès 2011 et à 3% dès 2013 (contre 7,9% en 2009 et 8,2% attendus pour 2010). Et ceci afin de revenir dans les clous du pacte de stabilité monétaire.

Dès ce lundi, l'Europe a commencé à se doter de moyens pour protéger l'Euro et autorisant la Commission à prêter 60 milliards d'Euros en son nom et en établissant un fonds de 440 milliards supplémentaires à prêter par les Etats membres qui peuvent se le permettre.

Barack Obama assure l'Europe du soutien américain, notamment au travers des interventions du FMI.

Clairement, la situation est hors de contrôle, très grave. Crise des dettes européennes, crise de l'Euro, crise de l'Europe. Les marchés ont la puissance de feu de casser l'Euro facilement. Ils ont les armes qu'il faut, ils maîtrisent les mécanismes monétaires qui peuvent détruire cet embryon d'Europe. Et ils ont de bonnes raisons de le faire. Notre malheur est que nous n'allons pas pouvoir la restaurer rapidement.

Il y a un conflit majeur entre les marchés (planétaires) et les politiques (nationaux).
Contrairement à ce que l'on pensait , pour l'instant, les marchés ont repris la main au détriment des États.

L'Europe est bancale. Depuis longtemps. Mal fichue. Sans gouvernement économique. Avec un système institutionnel mal fait. Aucun mécanisme de solidarité interne n'existe concrètement, on le voit bien avec la Grèce.
Il a fallu 6 mois à l'Europe pour répondre à la question des marchés : "Que faites-vous pour assister un État membre qui défaille ?". 6 mois. Pour l'Allemagne concède. Daigne.

Si les États européens avaient réagi plus tôt, il n'y aurait jamais eu de crise grecque.

"In war, you win or lose, live or die - and the difference is an eyelash."
- General Douglas MacArthur

Évidemment, les marchés vont tester la solidité, la profondeur de ce nouvel objet financier encore très incertain, inconnu. Et dans cette séance de tests à venir, tout est possible. Les endoscopies ne sont jamais agréables. Et les anesthésies collectives peu pratiquées.

Que faudrait-il faire ?
Le processus d'intégration est directement en cause. Depuis la création de l'Euro, il ne se passe plus rien. Les égoïsmes ont repris le dessus. Le chacun pour soi est revenu au goût du jour, l'air de rien. Les marchés l'ont compris. Ils ont commencé à exploiter cette défaillance stratégique. Nous sommes au milieu d'un gué, à découvert, prêts à nous faire traire, État après État.

Vite, il faut reprendre la marche vers l'intégration européenne. Donner des moyens à la Commission, à la Banque Européenne d'Investissement en matière d'emprunt. Jacques Delors l'avait proposé il y a vingt ans. Ce que l'Europe des Nations n'a jamais accepté.
La BCE a, dans les limites de ses compétences, été exemplaire, réactive.

Ou bien l'Europe est cassée par les marchés. Ou bien l'Europe repart - mais derrière quel leader ? Et avec quelle volonté des peuples ? Cette question est d'autant plus aiguë que les opinions ne vont pas rester indifférentes aux plans de rigueur à venir.

L'incertitude domine.
Il faudrait 600 milliards d'Euros pour éviter l'éclatement de la bulle des dettes souveraines.

Où est notre unité politique pour traiter ces questions ?
Les adversaires des étapes précédentes de la construction européenne, nous sommes en train de leur donner raison.

La construction de la Banque Européenne repose sur l'illusion que les marchés peuvent s'auto-réguler, en l'absence de tout contrôle politique qui assure que la croissance générée permette de compenser à terme la dette contractée.

Notre avenir dépend de notre capacité à rompre avec nos habitudes.
Ce message s'adresse surtout à nos amis d'Outre-Rhin dont les responsables politiques n'assument pas les choix politiques monétaires passés.

Peut-on dans cette période poser la question de savoir comment sortir un pays de la zone Euro ?
Le discours allemand sur la "punition" des Grecs était surréaliste. La responsabilité de l'Allemagne est importante.
La raison seule ne nous protégera des marchés. 43% des exportations de l'Allemagne sont tournées vers la zone Euro. Qui sont les PIGS ?

Entre les États-Unis, qui reprennent la route de la croissance et recréent des emplois, et l'Asie-Chine, impériale et conquérante, l'Europe découvre son déclin.

Où est l'Europe politique ? Où est notre destinée commune ? Quelle est le point de convergence ?